Armand Petitjean

Né en 1884 à Saint-Loup-sur-Semouse, en France, Armand Petitjean n'a pas commencé sa carrière dans la parfumerie mais dans le commerce international. Il a co-fondé une société d'import-export avec ses frères, opérant principalement en Amérique du Sud. Cette expérience lui a apporté une perspective commerciale mondiale qui influencera plus tard ses ambitions pour Lancôme.

Sa véritable vocation s'est révélée lorsqu'il a commencé à travailler avec François Coty, une figure révolutionnaire de la parfumerie moderne. Sous la direction de Coty, Petitjean a découvert son talent de « nez » et a appris l'art complexe de la création de parfums. Cette période fut fondatrice, façonnant sa compréhension de l'industrie et faisant naître son désir de créer sa propre marque qui représenterait le summum du luxe à la française, une vision que Coty avait, selon lui, compromise dans sa quête de volume.

Après le décès de François Coty en 1934, Armand Petitjean a décidé qu'il était temps de réaliser sa propre vision. Le 21 février 1935, à l'âge de 50 ans, il fonde Lancôme. Le nom a été inspiré par les ruines d'un château, Le Château de Lancosme, sa sonorité typiquement française correspondant au désir de Petitjean de créer une identité de marque mondialement reconnue.

Il a fait des débuts spectaculaires à l'Exposition Universelle de Bruxelles en 1935, en lançant non pas un, mais cinq parfums distincts : « Tropiques », « Tendres Nuits », « Kypre », « Bocages » et « Conquête ». Les cinq parfums ont remporté des médailles, établissant immédiatement la réputation de la marque en matière de qualité et d'élégance sophistiquée. Ce lancement audacieux a marqué son ambition de concurrencer les géants américains de la beauté en proposant une alternative résolument française.

La vision de Petitjean pour Lancôme s'étendait au-delà du parfum. En 1936, il a lancé la crème réparatrice révolutionnaire Nutrix, qui reste aujourd'hui un produit célèbre. Il s'est ensuite lancé dans le maquillage en 1938 avec « Rose de France », un rouge à lèvres rose délicat qui défiait la tendance dominante des rouges profonds. Sa philosophie était de créer une marque de beauté holistique qui incarnait l'élégance à la française sous toutes ses facettes.

Il a notoirement évité la publicité traditionnelle, estimant que la qualité de ses produits parlerait d'elle-même. Il a plutôt investi dans la formation d'un groupe restreint d'ambassadrices à l'École Lancôme, fondée pendant la Seconde Guerre mondiale. Ces représentantes formées éduquaient les clientes, cultivant une base de clientèle fidèle grâce à une expérience personnalisée et au bouche-à-oreille, une stratégie pionnière qui s'est avérée un immense succès. La rose, inspirée de ses propres jardins, est devenue le symbole durable de sa marque.

Armand Petitjean a réussi à faire de Lancôme une marque internationale prestigieuse, une référence en matière de sophistication à la française. Au début des années 1950, il a lancé deux autres parfums emblématiques, « Magie » et « Trésor », confirmant ainsi son statut de grand parfumeur français. Son ambition a culminé avec la construction d'une grande usine de production à Chevilly-Larue, surnommée le « Versailles de la parfumerie ».

Confronté à des difficultés financières et à des défis marketing dans un marché en pleine mutation, Petitjean a cédé l'entreprise à son fils, Armand-Marcel Petitjean, en 1961. Quelques années plus tard, en 1964, Lancôme a été vendue au groupe L'Oréal, qui a depuis perpétué l'héritage d'avant-garde scientifique et d'élégance à la française du fondateur. Armand Petitjean est décédé en 1970, laissant derrière lui une marque qui reste un leader mondial de la beauté de luxe.